Lettres de mon copain escrimeur :
découverte de l'escrime à l'école.
"Avec les copains
de ma classe de CM1 nous faisons de l'escrime pendant un trimestre, tu
sais, c'est super l'escrime ! Au début avec toutes ces explications
que nous donnais le Maître d'Armes, nous avons cru que nous n'y arriverions
jamais, mais petit à petit en écoutant bien les conseils
du Maître et des copains nous sommes tous devenus des champions.
En revenant de classe, après le 1er cours, la maîtresse nous
a fait faire un devoir d'expression écrite sur notre 1 ère
séance d'escrime, il fallait également faire un dessin. Puis
la maîtresse a fait des trous sur nos feuilles (comme pour les classeurs),
nous avons attaché toutes les feuilles avec un ruban et nous avons
ramené ce petit "livre" souvenir au Maître d'Armes pour notre
deuxième cours. Ce cadeau lui a tellement fait plaisir qu'il va
demander à toutes ses classes d'en faire autant. C'est Alain le
plus petit et le moins sportif de la classe qui a gagné la compét.
de Noël. Moi, j'ai compris pourquoi il a gagné : il attaque
beaucoup, et en plus il a compris les feintes, et il nous trompe tous quand
on croit qu'il va à la tête, on se protège vite la
tête, mais lui, il avait seulement fait semblant d'y aller, et puis
très vite il attaque au ventre ou sur les côtés...
C'est un peu de cette façon que j'ai découvert l'escrime
au sabre à l'Amicale. C'était, si je me souviens bien au
cours de l'année 1975, j'étais alors en classe de 5°
au Collège Desaix à Tarbes. Une fois par semaine, nous avions
la possibilité de pratiquer une activité sportive de notre
choix, au sein d'un club (dans le cadre des C.A.S.). Au début j'étais
attiré par l'étrangeté de cette arme...le Sabre !!
Mon Dieu, on pouvait faire du sabre, c'était possible ! Je m'imaginais
dans la peau d'un Zorro ou d'un pirate, d'un héros me rappelant
que j'étais aussi un gosse et que j'avais eu des rêves.
Pour nous présenter l'escrime au sabre, René avait commencé
par un peu de rire : une revue historico-humoristique des pratiques de
l'escrime et des "armes" employées, puis s'en suivirent quelques
règles fondamentales de sécurité, quelques autres
règles sur le respect de l'adversaire, et toute de suite après
: l'assaut !!!
Je me suis rapidement inscrit au Club où j'ai côtoyé
immédiatement quelques sabreurs débrouillés, ça
tapait fort, ça faisait mal, je pleurais et trépignais comme
un enfant gâté. Alors j'ai abandonné le sabre pour
un moment pour me consacrer à mon autre passion de l'époque
: l'équitation.
Pendant ce temps, l'Amicale Tarbaise d'Escrime,
sous la direction de René, achevait de jeter les bases de ce qui
allait devenir une des plus prestigieuses aventure du sabre international
: la formation et l'avènement de sabreurs de classe nationale, puis,
très rapidement internationale, et ce en nombre de plus en plus
important. Comme j'étais loin d'imaginer tout ça...Des sabreurs
comme Philippe Delrieu, Franck
Leclerc, lequel fut sélectionné pour les championnats
du Monde Juniors de Buenos Aires puis qui remporta le tournoi de Coupe
du Monde séniors de Hanovre à une époque où
le sabre mondial était archi-dominé par l'Union Soviétique
et la Hongrie, et Laurent Van Den Reysen
(mon frère aîné), débutaient le sabre. Les résultats
ne se firent pas attendre longtemps : champions inter régionaux,
champions de France, sélection pour les Championnats du Monde Juniors...
C'est alors qu'en 1977, je renouais avec l'Amicale. Entre temps, Pierre
Guichot, qui restera un de nos meilleurs sabreurs français rejoignit
l'Amicale, et deux ans plus tard, il fut sélectionné pour
les Championnats du Monde Juniors, où il participa à la Finale.
Pendant ce temps, Delrieu qui nous inspira la combativité et la
technicité, véritable marque déposée des sabreurs
tarbais, affirmait son rôle de leader, se distinguait à la
4° place lors des Championnats du Monde Juniors de Chicago par ses
résultats et ses premières sélections chez les seniors...
Quelle histoire ! Je n'ai cité que quelques noms. Mais vous savez,
je parie que l'Amicale pourrait dignement figurer dans le livre des records
pour le palmarès acquis en si
peu de temps et par des individus aussi différents par leur personnalité
et leur caractère que le sont les Delrieu, Leclerc, Guichot, Arribet,
Baylac, puis les frères Touya qui ont accru,
comme on le sait, le prestige et la renommée déjà
internationale du club.
Mais revenons à René. Parce que c'est par lui que tout est
arrivé. Quelle alchimie pédagogique pour qu'un tel palmarès
sportif fut possible en si peu de temps ? Je crois que le point de départ
est la passion de l'escrime, et du sabre en particulier, et surtout de
l'état d'esprit que René a su exacerber : le goût pour
le combat, du jeu avec l'adversaire, le panache, l'engagement physique,
l'exécution ultra rapide des gestes avec le maximum de précision
et de perfection technique. N'oublions pas de parler ici d'une autre particularité
de l'enseignement du sabre à l'Amicale : la leçon collective
! En effet, pour parvenir au niveau international, aucun des sabreurs que
nous avons nommé dont certains ont participé aux Championnats
du Monde et aux Jeux Olympiques (Delrieu et Guichot, respectivement 4°
à Séoul et 3° à Barcelone) n'a reçu de
leçon au plastron avec le Maître ! Pas un seul ! L'efficacité
de la méthode employée par René n'a pas cessé
d'être largement confirmée par le nombre extraordinaire de
titres nationaux et internationaux obtenus tout au long de l'histoire de
l'A.T.E. au sabre, qui est loin d'être finie et que le Maître
Baylac perpétue actuellement avec les résultats que l'on
sait. Il y avait aussi les fameux stages de préparation physique
que nous faisions à Cazaux ou en Bigorre lesquels nous ont laissé
des souvenirs ineffaçables : footing le matin et en fin d'après-midi,
pendant la journée travail technique et physique plus spécifique
à l'escrime, et quelquefois escalade ou spéléologie
pour la préparation mentale.
Le liant de cette recette, fut bien personnelle à René, il
s'agit d'un moral indéfectible, de la confiance, et d'un sens inné
de l'amitié et de la rigolade. Je peux dire avec certitude que c'est
à l'Amicale et non lors de mon passage à l'I.N.S.E.P. que
j'ai vécues, et de loin, mes plus heureuses années d'escrimeur,
et d'adolescent. C'est au contact de l'escrime à l'Amicale que j'ai
pris goût au travail acharné avec une recherche incessante
de la perfection, car René a très bien su nous l'inculquer,
et nous finissions par rechercher, par nous mêmes, toujours plus
d'entraînement et de perfection. Cela m'a aidé, j'en suis
convaincu dans mes études universitaires et pour bien d'autres choses.
Certes, ma carrière d'escrimeur, n'a pas été tout
à fait conforme à mes rêves. Je me revois dans la chambre
de l'I.N.S.E.P. que je partageais avec Pierre et Franck, lorsque ces derniers
recevaient leurs survêtements de l'Équipe de France, ou lorsqu'ils
partaient pour les championnats du Monde ou pour les Jeux Olympiques :
c'était dur, car je m'entraînais beaucoup, peut-être
même jusqu'à la saturation. Mais maintenant, lorsque je regarde
en arrière, je constate que ces années furent grandioses
dans ma vie de sportif.
Je n'observe plus de très près les exploits de nos sabreurs,
mais lors des grands événements, quand je m'aperçois
que ce sont encore des tarbais qui sont parmi les plus performants, ou
les plus performants (voir le palmarès impressionnant de Damien
TOUYA depuis ses débuts, ou de sa soeur Anne-lise qui vient de conquérir
le titre de Championne du Monde au Sabre), je suis très fier d'avoir
été l'un des leurs.
Patrice
VAN DEN REYSEN.
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